Fin 2016, les taux longs commencent leur remontée à la suite de l’élection de Donald Trump et d’une Federal Reserve sensiblement moins accommodante qu’auparavant. Les perspectives favorables sur la croissance mondiale semblant se confirmer, la BCE lui emboîte le pas courant 2017 avec une réduction de ses programmes de rachat d’actifs (Quantitative Easing), mais en écartant toujours une hausse des taux directeurs. En effet, la reprise se réalise avec une inflation modérée en Zone Euro, qui limite l’opportunité d’un resserrement monétaire.
Début 2018, la hausse des taux longs se poursuit, avec une volatilité nettement plus importante. Le 10 ans a ainsi crû cette semaine de plus de 10 pb et franchi non seulement la barrière symbolique de 1,00%, mais également sa valeur de début 2016 (1,113% vs. 1,013%).
Un retour à la normale en somme : une croissance qui se solidifie, des politiques monétaires pour partie revenues vers des mesures conventionnelles, et des taux plus en adéquation avec la réalité économique (ce qui ne facilitera pas les choses des grands emprunteurs). Rappelons que les taux très bas, et les valeurs négatives des taux courts européens restent liés à une situation économique exceptionnelle.
Mais s’ajoute à ces éléments un invité surprise : le coût de la ressource est en nette hausse depuis le début de l’année. En décembre dernier, nous alertions sur une évolution réglementaire importante touchant le secteur bancaire, et notamment la finalisation des accords de Bâle III. Pour mémoire, ces derniers intègrent, pour les banques modélisant le risque par des méthodes internalisées, un plancher sur les exigences de fonds propres qui passera de 50% à 72,5%, entre 2022 et 2027. Les banques semblent prendre les devants et se mettent d’ores et déjà à jour par rapport à ces exigences, entraînant de fait la hausse du coût de la ressource.
Ainsi, alors que le taux d’emprunt à 15 ans en septembre/octobre 2016 évoluait, dans les meilleures offres, autour de 0,70%/0,75% (période où taux de marché + Funding évoluait autour de 0,55%/0,60%), les taux seront plus probablement proches de 1,60%/1,80%. Soit un doublement du taux d’emprunt par rapport à l’automne 2016 ! Signe qui ne trompe pas, une hausse des marges de la Caisse des Dépôts est déjà prévue, et la Caisse fait maintenant feu de tout bois pour valider les dossiers en cours avant cette augmentation.
Si le Funding reste encore inférieur à ses plus hauts de 2016 et plus encore de 2013/2014, cette hausse devrait s’inscrire dans la durée. 2018 devrait donc être marquée par une hausse très sensible du coût de l’accès au crédit, les marges devraient monter de 0,30% pour les meilleures à 15 ans vers 0,60%, sans écarter, qui plus est, une sélection drastique des emprunteurs quant à leur solvabilité.