« J’aime les chouettes, ce sont des animaux très sages » avait répondu Christine Lagarde au quotidien Die Zeit lorsque celui-ci lui posait la fatidique question concernant sa politique monétaire à savoir : faucon ou colombe ?
Ces mots sont ressortis plusieurs fois la semaine dernière après la première conférence de presse de Madame Lagarde. S’il est vrai que son prédécesseur, Mario Draghi, avait tracé une ligne politique en engageant la BCE jusqu’à mi-2021 (c’est-à-dire un an et demi après son départ), la nouvelle présidente de la BCE ne se contraint pas au statu quo. Comme elle l’a précisément affirmé jeudi dernier « I have my own style », et comme pour affirmer sa capacité à prendre des décisions, et à casser l’image de « bon soldat » que certains journalistes lui avaient donné lors de sa prise de poste, elle veut procéder à une Strategic Review, c’est-à-dire un grand audit de la situation économique de la Zone Euro. Un exercice auquel certaines Banques centrales se livrent régulièrement, mais auquel la BCE ne s’était pas livrée depuis ….2003. A ce sujet, la « chouette présidente » a rassuré : il est tout à fait normal qu’un nouveau dirigeant commence son exercice par un état des lieux.
La Strategic Review en question prendra toute l’année 2020 pour être réalisée, et l’on pourrait facilement imaginer qu’à terme, l’objectif de cet exercice soit de dresser un nouveau tableau de bord pour le mandat à venir avec de possibles modifications de politique(s) monétaire(s). Du moins on peut se rassurer en se disant que d’ici là, la BCE continuera sa politique accommodante.
Enfin, si dans son ensemble, le dernier discours de la BCE ne divergeait pas du précédent, un point a toutefois retenu notre attention : Christine Lagarde a fortement appuyé sur la question de l’écologie. Une question pour laquelle la BCE s’était jusqu’ici contentée de laisser gérer les Etats membres, tout en prenant quelques mesures « eco-friendly ». Certains y voient ce qui pourrait être l’amorce d’un nouveau tournant dans la politique des Banques centrales et particulièrement de la BCE, en étendant (encore) son rayon d’action et de responsabilité sur les Etats membres en mettant en place des politiques certes accommodantes mais favorisant plutôt les projets éco-responsables. Un tournant qui lèverait encore un peu le niveau de responsabilité des Etats…
Globalement, ce discours qui clôture l’année 2019 nous laisse entrevoir l’année à venir sous le prisme de quelques interrogations : quel sera le résultat de la Strategic Review ? Pourrait-elle pousser à (ou a-t-elle été lancée pour) changer la politique monétaire de la BCE à moyen terme ? L’écologie pourrait-elle prendre une importance croissante pour l’institution ? Ainsi que cette quasi-certitude : les taux resteront bas jusqu’à mi-2021 (au moins), ce qui laisse entrevoir l’année 2020 comme une année calme, même si il faudra rester très attentif car en parallèle les stratégies des banques évoluent…